Marta De Pascalis est une artiste italienne basée à Berlin. Elle travaille avec des synthétiseurs analogiques et des bandes et a déjà sorti trois albums depuis 2014, dont le dernier, Sonus Ruinae, a été édité en septembre 2020 sur le génial label berlinois Morphine. Elle fait aussi partie du programme Shape et on peut regarder cette interview d’elle réalisée l’an dernier lors de sa venue à Rennes, à l’occasion du festival Maintenant – ça m’a rappelé au passage que très peu de choses me mettent de meilleure humeur que d’entendre de l’anglais parlé avec un accent italien.
Dans le cadre de notre cycle « Musique et soin », Marta nous a préparé un mix qu’elle décrit comme une collection de « healing sounds » qu’elle envisage comme des « phares auditifs voués non pas à nous guider sur la route de la fuite [escape route] mais à approfondir le temps présent tel qu’il est. Pour être présent au présent, dans le présent. » Si je devais extrapoler, à l’écoute de ces soixante minutes qui passent d’Alice Coltrane à A.R. Kane via Philip Jeck et Eno pour s’achever sur un très très beau morceau d’Andrea Belfi, je dirais qu’il ne s’agit pas de musique relaxante ou apaisante mais de musique qui, par l’interaction même qu’elle déclenche, déploie en notre direction des vertus thérapeutiques qu’elle nous invite à activer. Ce sont des compositions qui ne font pas précisément « du bien », mais qui agissent de façon à ce que nous puissions nous éprouver nous-mêmes en tant que récepteurs, à étendre notre écoute et notre attention, à envisager autre chose que la simple résolution d’un mal psychique par un bien sonore. Elles nous font comprendre en somme que le bien ne saurait être un bien, une marchandise, et doit au contraire être entendu comme une énergie qui nous demande un effort, une intervention, une participation. C’est en ça que ces plages synthétiques jouant à la fois sur la répétition, la durée ou la texture, nous donnent de quoi procéder à un début de cure spirituelle et sensorielle : on les suit, on les embrasse, on y adhère, au propre ou au figuré. Et cette démarche, si elle peut se montrer plus exigeante qu’une heure passée au spa, est néanmoins très bonne pour la santé, je vous le garantis.
Grazie mille, Marta De Pascalis, et bon weekend à toustes.
Tracklist :
1. Giusto Pio : « Motore Immobile » [Motore Immobile, Cramps Records, 1979] 2. Alice Coltrane Turiyasangitananda : « Er Ra » [The Ecstatic Music Of Alice Coltrane Turiyasangitananda, Luaka Bop, 2017]
3. Brian Eno : « Undersea Steps » [Film Music 1976-2020, Opal Records, 2020]
4. Philip Thomans : « Nature Pieces IV » [Morton Feldman Piano, Another Timbre, 2019]
5. Sarah Davachi : « Play the Ghost » [Cantus, Descant, Late Music, 2020]
6. A.R. Kane : « Scab » [69, Rough Trade, 1988]
7. Philip Jeck : « A787 » [Spool, The Tapeworm, 2009]
8. Taylor Deupree : « Canoe » [Canoe, Longform Editions, 2020]
9. Alvin Curran : « Canti e Vedute dal Giardino Magnetico »
[Canti e Vedute dal Giardino Magnetico, Ananda, 1975]
10. Marta De Pascalis : « Anzar » [Anzar, The Tapeworm, 2016]
11. Andrea Belfi : « Parte Quarta » [Knots, Die Schachtel, 2008]
Ce podcast fait partie du programme « musique et soin » initié par le festival Les Siestes Électroniques, développé dans le cadre de la plateforme Shape et rendu possible par l’aide de l’Union Européenne (programme Creative Europe).