Les jeunes avec trigore, plus jamais tricards !

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2024
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Musique Journal -   Les jeunes avec trigore, plus jamais tricards !
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Aujourd’hui, j’aimerais faire un pas de plus dans un projet qui me tient vraiment beaucoup à cœur, à savoir l’explosion pure et simple des frontières de la déontologie (journalistique, entre autre). Ainsi : après avoir fait un article sur le label ayant sorti mon disque, puis la promo de mon concert en loucedé (c’était jeudi dernier et c’était top, merci), j’aimerais aujourd’hui carrément vous parler du fils du patron du label sus-mentionné, enfin de sa pratique quoi. Parce que, népotisme oblige, ce jeune Jules a lui aussi joué – mixé, plutôt – lors de ce concert, et j’avoue avoir été plutôt bien saucé par son feeling jersey ascendant Pikmin, un peu foufou et 100 % sincère (mention spéciale pour la rencontre entre Benny Benassi et la kizumba), à la manière de cette nouvelle génération en qui je place toutes mes billes, esthétiquement et éthiquement. J’ai totalement confiance, s’iels sont capables de nous retourner les paradigmes à pas vingt berges, j’ose même pas imaginer ce qui va se concocter dans ne serait-ce que 5 ans, ou l’année prochaine même.

Ça fait un bon bout de temps que je veux me pencher ici sur ce que j’appelle, vieille âme que je suis, la « musique de jeunes » – coucou Heuguet Guillaume, coucou Audimat. Par peur de ne pas trouver les mots ou de poser les mauvais peut-être, de faire des contre-sens et me rendre à l’évidence que je ne suis plus dans le coup, aussi. Mais ce que j’ai compris il y a peu, c’est qu’être à la ramasse est un état étrangement revigorant qui permet, en plus de laisser de la place aux autres, de comprendre nouvellement, dans un écart, ce que l’on aime, de (se) redécouvrir par la même occasion – c’est certes un peu new age mais c’est exactement comme ça que je vibre inside en ce moment. Pour aller plus loin, je dirais même qu’être dans les choux musicalement, ça n’existe plus. On se rend compte que ça n’a jamais existé même, qu’il y a une infinité de chemins se chevauchant, un tissage de singularités qui communiquent, la fameuse « structure qui relie » de Gregory Bateson (merci Lou-Maria). Voilà une des choses, parmi milles autres, que m’apprennent « les jeunes ».

Tout ça connecte un peu avec mon dernier article (la musique qui craint, le cringe dont je n’avais même pas parlé je crois, tout ça), le dépasse je pense ; mais ce que j’essayais de formuler, en parlant de ces morceaux médiocres et magnifiques qui nous constituent, devient caduque devant cette géographie nouvelle et inouïe. Il y a une splendeur chez Trigore, qui m’avait déjà frappé/saisi lorsque j’avais rencontré les gentes du salon Paper Melody (avec lesquel·les nous avons diversement collaborées ces derniers temps, Étienne, Guillaume ou moi) : cette faculté à faire émerger la beauté du simple, à rider le flux à la première personne sans jamais abandonner la complexité du monde. Là où le dariacore ou 100 gecs peuvent un peu me fatiguer, eux me gorgent d’espoir, et je ne crois pas que cela soit une question de genre musical. Je pourrais évidemment parler d’hyperpop, de PC Music ou de Sophie, mais je préfère, comme d’habitude, aborder les choses en terme de sensibilité, d’ontologie presque (tiens, ça faisait longtemps).

Quand je parcours le soundcloud de ce jeune artiste (littéralement, Jules vient d’entrer dans une prépa Beaux-Arts), tout se mélange et s’altère pour former une multiplicité éthérée. C’est une forme perçue en flou HD qui, infusée de la mélancolie d’un écroulement, dit une autre autre façon d’être sincère. Là dedans, c’est la grande collision et la grande confusion, ça va vite mais c’est délicat et élégant, toujours bien tight sur la ligne ondulante : du jersey et du garage, du rap évidemment, les consoles Nintendo de la gamecube à la switch, ce que j’imagine être un centre commercial à Shibuya, de la gaze et des mélodies crève-cœurs, des synthés et des guitares, des gros subs, des voix impossibles qui narrent et des samples abusés (même si rien n’est plus too much maintenant), un cadre harmonique qui parlera à quiconque ayant déjà jouer à Animal Crossing ou NieR Automata. Les grandes émotions (de synthèse ou non) comme un quotidien, émo comme jamais. Pour comparer ce qui n’est pas comparable, je pense souvent à Indian Summer en écoutant sa playlist Audio Guide, où je ne reconnais pas beaucoup de noms (Huerco S., Yawning Portal, evian christ, Loukeman) mais évolue avec aisance dans une matrice familière et mouvementée où la césure entre le « pointu » et le « courant principal » est un artefact que même les archéologues ne pourront pas mettre à jour, où les énergies et affects sont fluents, micrdosés – ce qui me fait penser à ce que disait Étienne sur la musique de Malibu, il y a quelques temps.

Je vous invite donc à vous perdre dans cette sélection fascinante, bien on point sans en faire des tonnes. Il y a aussi plein d’autres trucs trop mignons, des mix avec différentes vibes, comme iels disent. J’aime beaucoup ses tracks perso (« One / Heart », « Satellite lights go down » ou « Scene / Killer »), des objets qui se situent quelque part entre la compo, l’edit et le mash-up ; ça ne peut pas rater la cible, c’est inarrêtable et il y a du Katy Perry, je suis vaincu ! Si aujourd’hui je réfléchis à ce que j’écoute dans une optique géopolitique (les temps changent, les gens aussi), que j’ai ralenti très fort le cinéma états-unien et les plateformes de streaming, tout cela pour contrer à mon échelle un soft power à peine invasif (oui, chacun peut agir !, c’est comme le recyclage, mais sauf que là on ne refout pas tout dans la même poubelle à la fin… je crois), je dois dire que l’omniprésence de celui-ci chez Trigore me revigore. Sûrement parce qu’il est chez lui déjà appréhendé comme révolu, avec nostalgie, comme quelque chose de lointain, qu’il met à jour son ébranlement, acte sa dissolution.

ps : j’écris tout ceci depuis un ordinateur macintosh assez récent, dans une chambre à Bruxelles ; le monde n’est pas affaire de système, c’est beaucoup de choses contradictoires en même temps, etc, etc … see ya, xoxo !

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