No wave alert : Plaine des bouchers is the new Lower East Side

Easy Goat Zehr Goat!
Chrüsimüsi Records, 2024
Écouter
Bandcamp
Musique Journal -   No wave alert : Plaine des bouchers is the new Lower East Side
Chargement…
S’abonner
S’abonner

Rien n’est gagné mais : depuis lundi en 8, les nuques sont un peu moins raides, les regards moins durs et le soleil enrobe plutôt qu’il ne frappe. Ce n’est qu’une impression, rien n’a fondamentalement changé, mais nous pouvons souffler, un peu. En tout cas moi je souffle, même si oui, j’ai besoin de vacances mais n’en prendrai pas vraiment. Toujours, entretenir – et vous entretenir de – mes monomanies musicales est un plaisir auquel je ne trouve que peu d’équivalent (si ce n’est la fin du salariat, déguisé ou non) mais écrire sans cesse, camarades, ressemble de plus en plus à l’érection d’un mausolée. Je vais donc grappiller où je peux, en ralentissant sur la déprime tout en doublant la mise sur le fun par exemple. Les œillères sont en place, hier midi c’était seiche en persillade, les cigales chantent comme jamais, je vais vous angoisser par mon surplus de positive attitude, vous êtes pas prêt·es !

Pour ce faire, je me suis préparé une petite diète spéciale « lâcher prise » (on a une huile essentielle de massage qui s’appelle comme ça avec ma chérie, j’ai toujours trouvé ça à la fois géniale niveau marketing et un peu cavalier), traitement de choc pour purger tout le caca accumulé depuis la réforme des retraites. On y va par étape, tranquille, mais commençons tout de même avec quelque chose d’assez relevé pour marquer l’occasion.

Zehr Goat! est le très logiquement nommé premier album de l’unité révolutionnaire branque, queer et strasbourgeoise Easy Goat. Je ne sais pas si cette expression étrange a une quelconque signification à quelconque échelle, mais je la trouve aussi kinky qu’étrange, voire un peu sensuelle et monstrueuse (cf. la pochette magnifiquement onirique de Caroline Dargere) ; en tout cas elle me plaît et sied parfaitement au quartet formé par Zoé Heselton, Fearless Alfredo, Kelly Placard et Zad Kokar, à sa musique aussi. Ces musicien·nes sont des protagonistes récurrent·es-mais-pas-trop de la grande fresque de ma vie, mais surtout des personnes très importantes pour la musique dans la cité-capitale de l’Europe et au-delà. Je ne les vois pas autant que je le voudrais mais c’est toujours avec un plaisir immense que j’interagis avec elleux, souvent en contexte festif et/ou musical. Notre dernière rencontre a même eu lieu en bloc, toustes ensemble au QG du Diams, alors qu’iels répétaient justement ; un peu rincé, je posais une première oreille à leur musique, filtrée par la distance ; déjà, la démence entretenue et méthodique de la bique était bien palpable.

Pour qualifier leur musique j’ai lu sur le web la formule « queer spoken no wave » et je trouve ça pas mal juste, même si je trouve un peu couillon de genrer musicalement un tel ensemble, mais cela n’engage que moi. Il y a aussi un cluster de termes épars – rock Strasbourg alternative anti-jazz diy garage lofi post-punk punk Biel/Bienne – sur la page Bandcamp du label biennois Chrüsimüsi Records qui a sorti cette cassette, qui ne dit rien autant que tout et donne donc une idée. Je valide absolument tout ça, et en utilisant mes mots je dirais qu’il s’agit d’une musique abrupte et théâtrale, virtuose dans son anti-virtuosité (Zad, à la batterie, c’est quand même une des clés de voûte du truc), marquée par une grandiloquence poético-politique un peu beat qui réconcilie l’ABC No Rio et le Village Vanguard, ce qui est assez cool. Les espaces sont vastes, il y a des instruments dont l’usage est du genre interlope, des synthés kraut et Varèse ; on se marre et on se révolte pas mal.

Ici, tout le monde chante. Les voix ont leur individualité au sens où elles incarnent. Les chanteur·euses sont des personnages, on les reconnait sans peine même s’iels ne sont pas figé·es – pour caricaturer je dirais : Zoé, grande pythie déclamante ; Kelly, mercenaire survoltée et précise ; Alfredo, tornade hurlante et Zad, punkos borderline. C’est une véritable coopérative brechtienne (depuis quand n’aviez vous pas lu cet adjectif, que je ne maîtrise moi-même que de très loin ?) ce truc, et j’avoue que cela me botte fort. Le programme est clair : « I Want a Dyke for President », « People Like You Make Me Sick », « White Cis Het Nightmare Song », « Money (That’s What I Want) », l’ambiance tient plus du cassage de briques par la dialectique que de la contemplation du drame. On reprend la no wave où l’avait laissée les ainé·es pour en faire un truc différemment dangereux, plus dans la joie mais toujours aussi frontal ; je vous conseille d’ailleurs de les capter en concert, ça prend un degré d’exaltation supplémentaire.

Allez pour moi c’est l’heure d’aller parfaire le bronzage, peut-être de penser à l’apéro, et faites de même, on l’a mérité ! Sinon je n’ai pas encore d’infos sur la thématique caprine, mais je leur demanderais à l’occasion.

Quand y’en a marre, y’a le mbalax !

Ne pas subir le monde mais le transformer, tous les jours en commençant par soi-même, radicalement et sans oublier qui nous continuons de tracer un chemin entamé il y a un petit moment : voilà ce que semble nous dire le mbalax, musique populaire sénégalaise dont Loïc Ponceau nous entretient aujourd’hui à travers trois albums.

Musique Journal - Quand y’en a marre, y’a le mbalax !
Musique Journal - Une mixtape exclusive de Bachir et Raph pour accompagner la lecture du livre TRAP

Une mixtape exclusive de Bachir et Raph pour accompagner la lecture du livre TRAP

Si vous n’avez toujours pas fait l’acquisition du livre TRAP, édité par Divergences et Audimat en mai dernier, ce mix brillant signé par nos deux confrères et amis de l’Abcdr du Son, qui retrace l’histoire de cette scène à travers ses grands beatmakers et ses instrus majeures, devrait vous aider à finaliser l’acte d’achat.

Un fabuleux disque d’indie-pop irlandaise où toutes les chansons sont pareilles

On parle aujourd’hui d’un des groupes indie les plus aimés des années 80 : ce sont les Irlandais de Microdisney. Leur premier et monolithique album s’écoute toujours aussi bien.

Musique Journal - Un fabuleux disque d’indie-pop irlandaise où toutes les chansons sont pareilles
×
Il vous reste article(s) gratuit(s). Abonnez-vous pour continuer à nous lire et nous soutenir.